Interpellation des listes aux élections européennes par différents collectifs sur des questions liées au transport et à la mobilité et réponses de la liste La France insoumise pour les élections européennes 2019.

Questions de l’Association Prévention Routière

Dans le cadre des élections européennes, vous nous avez soumis deux propositions pour
atteindre l’ambition du « zéro décès » sur les routes d’Europe. Les objectifs fixés en
2010 et renouvelés à Malte en 2017 ne seront que difficilement atteignables.

Concernant la généralisation de l’éthylotest anti-démarrage dans tous les véhicules afin
de lutter plus efficacement contre l’alcool au volant, nous sommes favorables à cette
disposition. Elle a en effet montré son efficacité en étant obligatoire à bord des autocars.
Il est en ce sens pertinent de l’étendre aux véhicules particuliers. Il s’agit par-là de
rendre ces dispositifs obligatoires dans tous les nouveaux véhicules. Il sera néanmoins
nécessaire sur les Etats membres et des entreprises publiques liées au secteur du
contrôle d’alcoolémie occupent une place prépondérante afin d’éviter de créer un
nouveau marché qui ferait fructifier des entreprises sous couvert d’agir en faveur de la
sécurité routière. La lutte contre la mortalité au volant relevant en effet de l’intérêt
général, il est anormal que les politiques en ce sens viennent servir des intérêts
particuliers.

Pour ce qui est de l’instauration d’un partage en open source des données relatives aux
accidents de la route pour mieux cibler les actions de prévention, nous y sommes
également favorables, avec prudence néanmoins. L’open data lorsqu’il permet le
partage de données scientifiques d’utilité publique constitue une source d’informations
pour en effet mieux définir les questions sur lesquelles il est nécessaire d’intervenir
prioritairement. Il faut cependant veiller à ce que ces données soient utilisées au nom de
l’intérêt général et qu’elles ne soient pas récupérées par des acteurs privés qui
pourraient notamment s’en servir à des fins commerciales. Ainsi, si ces données
venaient à être utilisées, il faudrait également penser à un cadre de protection à l’échelle
européenne. Il sera important que ce partage se fasse par de l’open source.

En espérant avoir répondu à vos questions,
Merci de l’intérêt que vous nous avez porté par ce présent questionnaire

1.1- Compte-tenu des orientations de l’Accord de Paris et de la Déclaration de Graz, quelles
nouvelles orientations pensez-vous utile et nécessaire de définir pour la politique européenne des transports ?

Du 29 au 30 octobre 2018, une réunion informelle des ministres de l’environnement et des
transports de l’UE s’est tenue à Graz (Autriche) pour discuter des « mobilités propres » en Europe. En a résulté la ”Déclaration de Graz ”, qui enjoint la Commission Européenne à développer et mettre en œuvre des stratégies pour une ‘mobilité propre, sûre et abordable pour l’Europe‘ et vise la réduction des émissions de GES dans le respect de l’Accord de Paris. L’UE s’est engagée lors de la COP21 en 2015 à réduire d’au moins 40 % les émissions des gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990, dans l’ensemble des secteurs de son économie. Rappelons que pour l’heure aucun pays européen n’a formulé d’engagements qui respectent l’Accord de Paris. Les transports sont responsables de près de 30% des émissions totales de CO2 de l’Union européenne. Parmi ces émissions, 72% proviennent du transport routier. La décarbonation des transports, qui sont responsables de 30 % des émissions françaises de gaz à effet de serre est loin d’être atteinte. En augmentation entre 2012 et 2017, ces émissions s’écartent chaque
année davantage des plafonds prévus : elles les ont dépassés de 6 % en 2016 et de 10 % en 2017. En cause, la hausse du transport routier, pour les individus (+ 6,6 % entre 2016 et 2017) comme pour les marchandises (+ 6 %).

L’Union Européenne mise principalement sur le passage à des « mobilités propres », c’est-à-dire
l’électrification du parc sans pour autant remettre en question le nombre de véhicules en circulation (notamment liés au transport routier), ni ses dogmes économiques d’austérité et de libre-concurrence qui poussent sans cesse au grand déménagement du monde et éloignent de plus en plus les citoyens des services publics, quand ceux-ci ne disparaissent pas tout simplement. Face à l’urgence écologique, nous revendiquons le développement de transports écologiques et populaires c’est-à-dire accessibles tant en fréquence, qu’en dessertes et en coûts, et les moins polluants au kilomètre par personne transportée, pour permettre au peuple d’avoir accès à ces réseaux qui eux-mêmes permettent l’accès à d’autres réseaux collectifs qui lui garantissent une vie digne. Il s’agit par ailleurs de planifier l’organisation des transports
dans la perspective d’un nouvel aménagement qui ne mette pas les territoires et les citoyens en
concurrence mais en relation. Ces transports écologiques et populaires doivent être mis au service d’une économie relocalisée conditionnée par ce que nous appelons la « règle verte » et respecte ceux qui sont aujourd’hui les travailleurs-esclaves de la route.

 

1.2- Les compétences et les moyens de l’Union européenne lui permettent-ils d’intervenir à la
hauteur des objectifs qu’elle s’est donnés ?

1.3- L’élaboration d’un nouveau Livre blanc par la Commission est-elle nécessaire ?

Il ne s’agit pas tant d’un problème de compétences et de moyens que de la prééminence d’un
dogme économique libéral au service d’une vision qui porte aux nues la compétitivité, la concurrence, la rentabilité etc. Ce cadre économique, fiscal et social est mise en œuvre au détriment d’un droit d’accès aux transports et du droit à un environnement sain de chacun et chacune.

 

2.1- Après l’adoption et la mise en œuvre actuelle du quatrième Paquet ferroviaire et la législation en cours sur le Paquet mobilité, le marché intérieur des transports terrestres de passagers et de marchandises aura-t-il atteint ses objectifs (en termes de coût pour la collectivité, de prix pour l’usager, de qualité de service et de préservation de l’environnement) ?

La libéralisation des services de transports repose sur les prétendues vertues d’un lien théorique entre ouverture à la concurrence, baisse des prix et amélioration du service. De nombreux exemples nous prouvent le contraire. Ainsi, l’ouverture à la concurrence de l’électricité et du gaz en France a fait monter les prix. 10 ans après l’ouverture à la concurrence, en juin 2015, le Médiateur de l’énergie disait ceci : « La concurrence était censée se traduire par une baisse des prix. Or, celle-ci est loin d’être au rendez-vous, particulièrement pour l’électricité ». En effet, la facture d’électricité s’est envolée de 49 % en moyenne (TTC) depuis 2007 pour les clients aux tarifs réglementés équipés d’un chauffage électrique et de 56 %
pour ceux qui utilisent un autre mode de chauffage. En ce qui concerne le transport ferroviaire, nous avons averti que cette logique aboutirait inéluctablement à un abandon des lignes jugées non-rentables par les opérateurs privés. Sans parler d’une dérégulation des prix au travers d’un “yield management” d’ores et déjà pratiqué. Le fret en France, est ouvert à la concurrence depuis 2006. C’est un véritable naufrage. Alors qu’en 1947, 75 % des marchandises transitaient en France par le rail, ce taux n’est plus que de 10 % en 2014. De 1990 à 2015, le transport routier de marchandises a crû de 40 % tandis que le transport ferroviaire baissait de 34 %. Ainsi, entre 1980 et 2014, la longueur du réseau ferroviaire exploité a été réduit de 22 %. La France est le seul pays d’Europe occidentale où le fret s’est effondré à ce point en quinze ans. Pour la SNCF, la concurrence a causé plus du doublement de la dette imputable au fret entre 2008 et 2014, selon la Cour des comptes.

Les piètres résultats français en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont à mettre en relation avec ce dogme économique. Après le naufrage du fret ferroviaire, bientôt celui du transport de voyageurs. Après avoir imposé la séparation comptable artificielle pour mieux arguer d’une prétendue irresponsabilité de la SNCF, ses lignes vont être ouvertes à la concurrence. Et d’ici 2024, ce sera le tour du réseau RATP. Obsédés par l’objectif de rentabilité au détriment du respect du droit au transport de chacun, 56 lignes et 120 gares sont menacées de fermeture selon le rapport Spinetta (les “UIC 7 à 9” représentent un peu plus de 9000 kms soit un tiers réseau). Nous sommes attachés à la défense des “petites lignes ferroviaires” et dénonçons de longue date la stratégie qui revient à en transférer la charge aux collectivités pour mieux s’en débarrasser. Au nom de cet objectif de rentabilité et de respect de la
libre-concurrence, les « cars macron » ont été déployés. Ils ont dans un premier temps servi d’alibi à la suppression de lignes ferroviaires pour finir par abandonner ces mêmes dessertes car jugées « non rentables », laissant les habitants sans alternatives autre que la voiture. A quoi rime le fait de supplanter les liaisons ferroviaires alors que le train est 3 fois moins gourmand en énergie que les autocars ? A peine 4 ans plus tard, il ne reste que deux compagnies en situation de quasi-monopole sur le territoire, et des citoyens désœuvrés qui n’ont plus ni train ni bus pour se déplacer. Tel est le vrai visage des logiques européennes en matière de transport.

 

2.2- Des améliorations au marché intérieur des transports devraient-elles être apportées, et
lesquelles ?

L’exigence de report modal repose sur la définition d’un cadre social et fiscal qui permette d’en
finir avec l’avantage concurrentiel de la route sur le rail et le fluvial. Paradoxe unique en France, depuis 1990, nous finançons sur fonds publics la route à hauteur de 66% contre seulement 17% au rail. Plus de camions, moins de trains, cela est une ineptie en termes d’aménagement du territoire et de transition écologique. En effet, le train émet 10 fois moins de C02 qu’un trajet en voiture, 50 fois moins qu’un trajet en avion. Le trafic de marchandises a diminué de 20% de 2006 à 2016 ; au niveau de l’UE, nous revenons presque à l’étiage de 1995. Dans le même temps, on constate une hausse des émissions de GES liées au transport de 20% en UE, 10% en France. Il est temps de mettre un terme notamment aux exonérations fiscales qui avantagent le transport routier au détriment du rail et du fluvial. Nous demandons par exemple à ce que soit mis fin à la niche fiscale bénéficiant au transport routier de marchandises qui a
représenté un manque à gagner pour l’Etat de 1137 millions d’euros en 2018. Cet argent doit être investi intégralement dans le développement d’alternatives tant pour les marchandises que pour les voyageurs.

La réduction de cet avantage concurrentiel doit également passer par la mise en place d’une taxe kilométrique qui intègre également, au titre du principe de pollueur payeur, les coûts générés en matière de pollution de l’air et du bruit. La pollution de l’air à elle seule génère des coûts de 101 milliards d’euros et 67 000 décès prématurés par an en France. A l’heure de l’urgence écologique, il est indispensable de se doter d’un outil qui pousse à la relocalisation de la production et de la consommation. Il n’est plus pensable que des marchandises parcourent l’Europe d’un bout à l’autre.

Concernant le transport de voyageurs, la cohérence des choix implique d’investir massivement
dans les transports les plus économes en émissions de gaz à effet de serre et les plus sobres en énergie, sur la base d’un principe de priorité d’investissement dans les moyens de transports les moins polluants et les plus sobres énergétiquement en grammes équivalent pétrole par passager-kilomètre. Et l’interdiction formelle de supplanter les lignes ferroviaires existantes par du transport par la route.

 

2.3- Faut-il approfondir encore la libéralisation des marchés, aller vers la dérèglementation des
contraintes techniques, sociales, fiscales, environnementales, ou faut-il au contraire redonner plus d’autonomie aux autorités nationales pour protéger les marchés nationaux ?

Les transports collectifs constituent un bien public. Ils soulèvent trois enjeux : démocratique,
écologique et social. Sur le plan démocratique, il n’y a pas d’exercice de la souveraineté populaire sans décision collective. Les droits des citoyens ne se réalisent qu’à partir du moment où ils peuvent accéder aux chefs-lieux, services de proximité et organismes administratifs. En plus de constituer une clé démocratique, les transports collectifs sont une clé écologique. Ils déterminent les modes de circulation des marchandises ou des personnes (pour substituer les plus propres aux plus polluants), les lieux de stockage centraux, les flux de consommation et les intermodalités disponibles (trains-trams-vélos). En outre, le réseau des transports détermine la capacité d’une population à occuper des emplois sur le territoire sans déménager. Plus ils sont fiables, rapides et économiques, plus les riverains se retrouvent en
capacité. Un service de transport homogène implique des recrutements massifs et une élévation des qualifications professionnelles de façon harmonieuse sur l’ensemble du territoire national, en éliminant toute logique de dumping.

Déréglementer le transport public implique une hausse de tous les coûts. Lorsque deux, trois ou
quatre lignes relient un point à un autre, les émissions carbonées s’envolent, les prix des billets
s’accroissent (généralement financés par des subventions publiques) et les conditions de  travail des personnels constituent la variable d’ajustement. C’est pourquoi les transports collectifs terrestres doivent être subordonnés à des décisions collectives, afin d’assurer un traitement égal des usagers en fonction de leurs besoins et de leurs moyens, plutôt que de dépouiller les consommateurs captifs qui n’ont pas d’alternative de transport ! Les pays européens qui ont privatisé le rail s’en mordent les doigts. La privatisation de British Rail a conduit à une hausse incontrôlée du prix des billets (encore +2,3% en moyenne par billet sur l’ensemble du réseau en 2017), le retard de trains (4 sur 5 sur le réseau du Sud
Southern Rail) et la réduction des personnels. Malgré la privatisation, plusieurs milliards d’euros de subventions de l’Etat britannique (4,6 Md€ en 2015–2016) sont nécessaires à la bonne exploitation des gares et des trains par les opérateurs privés qui assurent les services de transport. En Allemagne, le rail est aussi libéralisé. Ramené au kilomètre, le prix du billet SNCF est pourtant inférieur à celui du billet de la Deutsche Bahn (0,21€/km vs 0,26€/km).

 

3.1- Quelles mesures le Parlement européen devrait-il adopter pour développer une mobilité
accessible à tous ?

La fin de la libéralisation et de la dérèglementation à tout va en matière de transports, dont nous avons détaillé les répercutions ci-avant.

 

4.1- Considérez-vous que cette pratique des Paquets proposés par la Commission mérite d’être encouragée ?

4.2- Quels sont les sujets qui nécessitent que l’Union européenne légifère en matière de transport, mobilité et logistique, dans les cinq prochaines années ?

Pour toutes les raisons évoquées ci-avant, la mise en œuvre d’une politique ambitieuse de
transports écologiques et populaires est nécessaire. Elle passe par la mise en place d’une « règle verte » dont les implications en matière de transports seront multiples à appréhender : relocalisation des productions, réduction des distances en matière de transport des marchandises, investissements fléchés vers les modes les moins polluants, suppression des niches fiscales du transport routier et aérien, report modal sur les modes massifiés, arrêt de la construction de grands projets inutiles types infrastructures routières et LGV, moratoire sur l’artificialisation des sols (et notamment arrêt de la construction de centres commerciaux géants à l’extérieur des villes), normes contraignantes en matière de pollution de l’air.

 

5.1- Que pensez-vous des objectifs globaux que s’est donnés l’Union européenne en matière de lutte contre le changement climatique à 2030, et quelles seront vos propositions pour la révision de la NDC de l’Union européenne ?

5.2- Quelle doit-être la contribution du secteur des transports aux objectifs globaux de lutte contre le changement climatique, et cette contribution doit-elle être atteinte grâce aux développements technologiques ou par des changements comportementaux ?

5.3- Quelles mesures propres aux transports, applicables à l’ensemble des véhicules routiers,
soutiendrez-vous ? Comment les rendre acceptables ?

L’UE s’est engagée lors de la COP21 en 2015 à réduire d’au moins 40 % les émissions des gaz à
effet de serre en 2030 par rapport à 1990, dans l’ensemble des secteurs de son économie. Rappelons que pour l’heure aucun pays européen n’a formulé d’engagements qui respectent l’Accord de Paris. Une première priorité doit être de mettre en cohérence les mots et les actes.
Les transports sont responsables de près de 30% des émissions totales de CO2 de l’Union
européenne. Parmi ces émissions, 72% proviennent du transport routier. La décarbonation des transports ne peut pas passer par des changements comportementaux ni par l’électrification de tout le parc automobile. L’urgence écologique requière un changement radical des modes de production et de consommation ainsi qu’une remise en cause du modèle économique dominant obsédé par la concurrence et la compétitivité. En matière de transports comme de politiques environnementales au sens large, l’acceptabilité passe nécessairement par la justice fiscale. C’est ce que nous ont rappelé les gilets jaunes.

Avant de supprimer toutes les voitures thermiques, offrons des alternatives conséquentes (en terme d’accès, de fréquence, de coûts). Avant d’augmenter le coût des carburants pour les particuliers, supprimons les niches fiscales qui offrent un avantage concurrentiel démesuré au transport routier. Avant d’incriminer des comportements individuels, cessons le grand déménagement du monde par la multiplication d’accord de libre-échange et contraignons les industriels qui fraudent devant les normes anti-pollution.

 

6.1- Quelles mesures relatives aux transports permettraient d’améliorer la qualité de l’air en
Europe, et particulièrement dans ses centres-villes ?

6.2- L’Union européenne doit-elle adopter les seuils recommandés par l’OMS, et souhaitez-vous
notamment l’adoption de seuils journaliers sur les concentrations de particules fines PM 2,5 ?

Nous nous insurgeons contre la possible mise en place de ZFE, des zones dans lesquelles sera
instaurée une interdiction d’accès, sur des plages horaires déterminées, pour certaines catégories de véhicules et repose sur le système des vignettes Crit’Air. Or, les pauvres sont les premières victimes de la pollution sans en être les principaux responsables. En France, les personnes pauvres vivant dans des quartiers pauvres et pollués ont 5 fois plus de risques de mourir que la moyenne lors d’un épisode de pollution et paient 4 fois plus de taxe carbone en % de leurs revenus que les très riches qui émettent 40 fois plus de carbone qu’eux. Les riches polluent et les pauvres trinquent, en résumé. La mobilisation des gilets jaunes a montré une claire demande de justice fiscale. Les ménages aux faibles revenus possèdent généralement des voitures plus anciennes et plus consommatrices de carburant. Et le budget carburant
pèse deux fois plus dans leur budget que celui des plus riches (quasi 8% pour le premier décile contre moins de 4% pour le dixième décile). Un Français sur quatre dépense plus de 150 €/mois pour aller travailler en voiture, et le transport représente 21 % des dépenses des ménages ruraux. En parallèle, les alternatives se font rares, et souvent chères.

Comment interdire la circulation des voitures les plus anciennes, principalement possédées par les plus pauvres et donc les priver d’accès aux centres-villes au titre de la lutte contre la pollution de l’air alors qu’ils en subissent en premier les effets, le tout sans leur offrir d’alternatives ? C’est une triple peine. Nous considérons que les ZFE participent de la même logique que celle qui a prévalu lors de la tentative de hausse des carburants : il s’agit d’une mesure plus anti-pauvres qu’écologique. Améliorer la qualité de l’air doit passer prioritairement par la réduction du transport routier et dans les centres-villes par la mise en place de transports en commun de qualité, abordables et suffisamment dimensionnés pour répondre aux besoins. Au-delà, l’aménagement des villes doit être repensé pour limiter les migrations pendulaires inhérentes au phénomène de métropolisation. Il convient prioritairement de stopper la construction de centres commerciaux en périphérie des villes et de rapprocher bassins de vie et bassins d’emploi tout en appliquant une politique d’encadrement des loyers qui n’évincent pas systématique les pauvres des centres-villes.

 

7.1- Quels territoires, quels types de flux et quels segments de marché identifiez-vous où le report modal du transport de marchandises peut réussir ?

Le report modal est une question stratégique, qui garantit d’un seul coup la fluidité des voies de
circulation, leur pérennité en matière d’infrastructure, la diversification des sites de transit sur le territoire, la garantie d’un travail salarié de jour pour les agents et la réduction des nuisances écologiques et sonores. A l’heure actuelle, les palettes de fret, les marchandises de déménagement, les déchets et les matières dangereuses constituent l’essentiel du poids transporté par route. Leur capacité de chargement standardisé et leur sensibilité aux vibrations routières plaident pour un transfert volontaire vers le rail et le fluvial.

Pour des activités très légères (services, transport de matériau réduit…), le report modal de la voiture au vélo constitue une alternative enthousiasmante. Le report modal dépend cependant, en dernière instance, de l’organisation générale de la consommation. Une lutte résolue contre le gaspillage économique (suremballage, obsolescence…) et une relocalisation des productions vitales ou stratégiques reconfigurera totalement le paysage des transports de marchandises. Chaque étape dans cette direction conduira à une montée en puissance du report modal,
notamment au détriment de l’avion et du transport routier, en raccourcissant les distances et en limitant les stocks (de produits comme de déchets, à retransporter une fois usagés).

 

7.2- Faut-il poursuivre, voire renforcer, les soutiens communautaires dédiés au report modal du transport de marchandises ? Faut-il inventer de nouveaux mécanismes européens (subventions, éco-bonus) pour développer les services visant au report modal ?

7.3- Pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du transport routier de marchandises, l’Union européenne doit-elle faire un choix technologique ou respecter la neutralité technologique en se limitant à la définition d’objectifs de performance ?

Dans le sillage de la révision des normes s’appliquant aux émissions de CO2 des voitures, un accord a été trouvé concernant la réglementation encadrant la réduction des émissions de CO2 des poids-lourds neufs qui s’appliquera après 2020. Les poids-lourds comptent pour seulement 5% des véhicules en circulation au niveau européen, mais représentent 25 % des émissions de CO2 du transport routier. Nous constations que les objectifs de réduction retenus de ‑15% en 2025 et ‑30% en 2030 par rapport à 2019, restent bien en deçà de la trajectoire nécessaire pour que le secteur contribue au respect de l’Accord de Paris, qui implique une réduction de ces émissions d’au moins 50% en 2030. Par ailleurs, si cet accord comprend un seuil minimum de vente de camions à « faibles émissions » en 2025 a été , celui-ci reste non contraignant et des dérogations aux objectifs de réduction fixés restent possibles pour l’industrie jusqu’à cette date.

A travers cet exemple, nous souhaitons démontrer que la réduction des émissions de GES du
transport routier ne peut passer que par la réduction du nombre total de véhicules en circulation et des objectifs ambitieux et contraignants d’un point de vue technologique, bien que l’électrification du parc ne soit pas à nos yeux la panacée.

 

8.1- Les conditions de concurrence entre les modes de transport sont-elles équitables ? Si non, quelles mesures pourraient favoriser le report vers les modes les plus vertueux d’un point de vue environnemental ?

Voir la question 2.2 et notre réponse relative à l’avantage concurrentiel de la route. Rappelons
qu’en France, depuis 1990, 66% des financements publics ont été dédiés à la route, contre seulement 17% au train. Des décennies de sous-investissements dans le réseau existant et une politique de construction de LGV sans vision d’ensemble ont conduit à un vieillissement préoccupant du réseau ferré national ; tandis qu’une batterie d’avantages notamment fiscaux au permis un tel essor du transport routier et aérien.

 

9.1- L’Union européenne doit-elle se doter d’une stratégie logistique, et quels devraient en être les principaux axes ?

9.2- La logistique urbaine et son articulation avec les noeuds urbains des corridors européens doit-elle faire l’objet d’une stratégie particulière de la part de l’Union européenne ?

10.1- Les corridors actuels correspondent-ils aux besoins d’aménagement du territoire à l’échelle européenne, et permettent-ils d’atteindre l’objectif de cohésion territoriale ?

10.2- Quels effets et impacts attendez-vous du RTE‑T en France ? Les corridors européens sont-ils adaptés aux besoins des territoires français ?

10.3- Les projets des RTE‑T comprenant des tronçons en France, que sont le canal Seine-Nord
Europe et la liaison ferroviaire Lyon-Turin, doivent-ils de nouveau faire l’objet d’un soutien
européen dans la période de programmation 2021–2027 du MIE ?

11.1- L’articulation et les objectifs de ces divers instruments sont-ils satisfaisants ? Comment
souhaitez-vous les voir évoluer ? Doit-on poursuivre la concentration des fonds sur les projets à «valeur ajoutée européenne » ?

11.2- Comment assurer une bonne articulation entre les financements européens, nationaux et
régionaux ?

11.3- Les efforts en faveur du réseau capillaire du RTE‑T doivent-ils être accélérés, notamment au moyen des fonds structurels ?

11.4- L’entretien des infrastructures de transport doit-il faire l’objet d’une attention de la part de
l’Union européenne ? Sous quelle forme, entre un soutien financier et la définition d’un cadre
règlementaire commun de maintenance ?

(Réponse aux questions 9 à 11.) Ces deux projets que sont le Lyon-Turin et le Canal seine-Nord
sont à l’image de la stratégie européenne en matière de logistique, majoritairement composée de « grands projets inutiles » dans le cadre d’une « écologie de bulldozer » qui servent les intérêts privés, articulés et indissociables d’une politique économique qui pousse au grand déménagement du monde. Si soutien européen il doit y avoir, celui-ci doit se faire au profit de la relocalisation des activités et d’une planification écologique qui se détourne du renforcement de grands corridors qui délaissent de grandes parties du territoire.

Le projet du Lyon-Turin doit être abandonné. La France Insoumise prend la question du transport ferroviaire très au sérieux dans le cadre de la planification écologique. Nous pensons que nous n’avons pas besoin d’une deuxième ligne ferroviaire entre la France et l’Italie. Ce projet (privatisé) est motivé par les multinationales souhaitant une intensification du transport de marchandises vers et depuis les pays de l’Est. La ligne actuelle entre la France et l’Italie permet de mettre immédiatement près de 2.000 camions par jour sur des trains, alors pourquoi en ouvrir une deuxième ? De plus, cette nouvelle ligne coûterait environ 30 milliards d’euros, de quoi développer les liaisons régionales ! D’autant que la promesse d’une contribution européenne, à hauteur de 40 % de la partie transfrontalière du projet n’est pas acquise et a
déjà été revue à la baisse. En France, la part modale du rail n’est que de 7 % pour la traversée des Alpes.

Les promoteurs de la liaison ferroviaire Lyon-Turin ont réussi à décrédibiliser les capacités de la ligne existante pour le trafic de fret en France, dans le but de justifier la construction d’une ligne nouvelle à travers les Alpes. La ligne existante du Mont-Cenis, entre Lyon (Ambérieu-en-Bugey) et Turin, a été modernisée par la France et l’Italie pour un coût total de près d’1 milliard €. Elle est entièrement électrifiée, mais exploitée à seulement 20 % de ses capacités. Seules environ 3 millions de tonnes de marchandises traversent les Alpes par ce passage chaque année, alors que ses capacités sont évaluées à 15 millions de tonnes par l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL). Nous demandons également l’abandon du grand projet inutile qu’est le Canal Seine-Nord. Ce projet est pharaonique. Nous en dénonçons la gabegie financière (4,5 milliards d’euros), les retombées socio-économiques très largement surestimées et le coût environnemental. Le transport fluvial est une alternative crédible et conséquente à l’usage de la route pour le transport de marchandises au même titre que le transport ferroviaire. Mais il s’agit en priorité de maintenir le réseau à petit gabarit. Pour permettre la reconstitution du réseau, le besoin supplémentaire en investissement est estimé à 150 millions € annuels en France.

 

12.1- Partagez-vous les orientations portées dans le rapport adopté par le Parlement ?

12.2- Dans l’hypothèse où le mandat du Parlement serait remis en jeu, quelles positions défendrez-vous sur le projet de révision de la directive Eurovignette ?

13.1- Les recommandation de cette directive révisée sont-elles suffisantes pour renforcer la sécurité routière ? Faut-il également renforcer la coordination entre les autorités nationales ?

13.2- Faut-il créer une Agence routière européenne chargée de cette coordination ?

14.1- L’orientation générale adoptée au Conseil et les trois rapports parlementaires sur le volet
social du Paquet mobilité vous conviennent-ils, et pourquoi ?

14.2- Le cas échéant, êtes-vous favorable à l’organisation d’une convergence progressive des
conditions sociales du transport routier de marchandises au sein du marché intérieur ? Peut-elle passer par l’instauration d’une convention collective européenne dans le secteur des transports ?

Toute élévation des conditions d’emploi et de salaire des routiers est souhaitable, afin d’améliorer leur qualité de vie et de gommer progressivement le dumping qui fait rage sur les routes. Mais deux verrous bloquent tout effort en ce sens. Premièrement : les traités européens actuels et le marché unique.

Une partie conséquente des travailleurs du transport routier sont en effet sous statut de détachement. Ils signent un contrat dans un pays tiers, qui n’est souvent pas leur pays de résidence (ils n’en maîtrisent pas forcément la langue), ni même celui de l’employeur. Au final, ils cotisent dans un pays inconnu, pour ouvrir des droits inaccessibles ultérieurement, le tout subventionné par les contribuables du pays d’accueil contraints de compenser par le biais de paniers fiscaux les manques à gagner de la sécurité sociale. Ce statut dangereux bloque tout effort d’harmonisation, d’autant plus que le lobby routier a obtenu en mai 2018 d’exonérer les travailleurs détachés routiers de toute réglementation publique européenne !

Deuxièmement : la liquidation macroniste du Code du travail. Avec le transfert d’un nombre croissant de sujets vers les accords d’entreprise, les conventions collectives sont progressivement vidées de leur sens. Pire encore, lorsqu’elles sont chargées de régler des activités précédemment fixées à l’échelon national (comme les CDI de chantier), les conventions collectives concourent à fragmenter le droit du travail national.

 

14.3- Faut-il continuer d’avancer progressivement par la recherche d’un compromis ou faut-il
adopter une démarche plus volontariste (instauration d’un SMIC européen par exemple) ?

15.1- Comment assurer le développement européen du véhicule électrique (batterie ou hydrogène) et s’assurer de sa compétitivité mondiale ?

15.2- Comment assurer un déploiement suffisant des infrastructures de recharge électrique ?

15.3- Faut-il un soutien communautaire à l’émergence d’une filière de la batterie, et si oui
lequel ?

Nous considérons que la conversion du parc automobile au tout électrique n’est pas une politique écologique suffisamment ambitieuse. En effet, si cette conversion vise à limiter les effets de gaz à effet de serre, elle ne remet pas en cause le nombre de véhicules individuels en circulation qui est précisément le cœur des problèmes relatifs à la mobilité dans notre société. De plus, en 2016, il s’est vendu dans le monde 2 millions de voitures électriques, ce qui représente environ 2.3 % des 90 millions de voitures vendues au total. Si une bonne partie de la planète suit l’exemple de la France sur la conversion électrique du parc automobile, cela signifie qu’en 2040, les ventes de voitures électriques atteindront probablement 40, 50 voire 80 millions de voitures vendues par an. On peut estimer en 2040, l’existence de 530 millions de véhicules électriques dans le monde, soit entre 150 et 200 fois plus qu’aujourd’hui, si cette politique se généralise. Or, actuellement, près de 35 % du lithium produit sur la planète sert d’ores et déjà à fabriquer des batteries, et une telle conversion risque d’épuiser cette ressource à très court-terme.

Quel est le sens de produire et d’organiser une transition énergétique dont la viabilité ne sera
effective qu’une trentaine d’années ? Faut-il vraiment fonder globalement toute notre organisation économique et sociale sur un modèle technologique qui sera obsolète au bout de 30 ans ?

 

16.1- Comment rétablir une vision partagée de l’avenir de l’automobile entre l’ensemble des
acteurs ?

16.2- Faut-il soutenir l’industrie automobile européenne dans sa transition conformément à la
politique de baisse des émissions de gaz à effet de serre, et selon quelles modalités ?

L’urgence écologique impose de sortir du dogme de la voiture individuelle qui contrairement au
mythe sur lequel elle repose, rend les gens dépendants, notamment en termes de coûts d’entretien et de contraintes liés à la congestion routière. Si le développement des transports en commun est indispensable, une période de transition est nécessaire pour ne pas laisser les individus sans alternatives. Cela impose une conversion de l’industrie automobile qui se conforme aux impératifs écologiques. Dans ce cadre, la responsabilité n’est pas individuelle mais repose sur l’établissement de normes contraignantes pour les industriels afin d’éviter que d’autres scandales du type DieselGate se répètent. Cette affaire a révélé en 2015 que Volkswagen avait équipé ses moteurs diesel de logiciels truqueurs capables de déjouer les
contrôles antipollution. Depuis d’autres constructeurs ont été impliqués et il a été mis en évidence que de nombreuses normes antipollution n’étaient pas respectées par les constructeurs automobiles telles que Renault et PSA. La pollution fait des dizaines de milliers de morts par an et il est intolérable que les puissances publiques soient complaisantes avec de tels agissements.

 

17.1- Pour répondre à ces défis, pensez-vous qu’une industrie ferroviaire européenne compétitive à l’échelle internationale puisse émerger d’un renforcement de la concurrence sur le marché intérieur ou qu’elle doive être soutenue par les Etats-membres et l’Union européenne à travers des regroupements ?

17.2- Quelles leçons tirez-vous de l’échec du rapprochement entre Alstom et Siemens ?

Les principes européens ont joué contre nos intérêts industriels les plus fondamentaux. L’objectif fondamental de l’Union, la « concurrence libre et non faussée », est grotesque. Il interdit de disposer de champions en France ou en Europe, sur certaines productions essentielles. On ne peut envisager la transition énergétique sans produire nous-mêmes des quantités importantes de générateurs propres, de la géothermie aux centrales marémotrices. Ce droit européen est l’obstacle qui interdit d’investir dans les secteurs stratégiques. Nous avons su bâtir Ariane ensemble grâce à des aides d’Etat, désormais interdites… au prix de tous les futurs Ariane abandonnés !

 

17.3- L’Union européenne doit-elle développer une politique industrielle dans le domaine des
transports ?

Les transports constituent un secteur économique clé (valeur ajoutée brute : 4,8 % au total pour les 28 pays de l’Union européenne, soit 548 milliards d’euros), qui génère 11 millions d’emplois en Europe. La planification écologique en matière de transports impose l’émergence d’une politique industrielle, d’abord nationale, qui réponde à des enjeux stratégiques d’un point de vue environnemental et économique. Rappelons que les GES transports dépassent de 10,6% l’objectif 2017 et constituent 29% des émissions GES françaises. Le transport de marchandises (poids lourds et véhicules utilitaires) représente environ 42% des émissions de CO2 dues au transport routier. Il y a urgence d’un report modal vers des modes de transports moins émissifs. D’après une étude Ademe (2016), la transition vers un système énergétique 100% décarboné et la diminution de la consommation finale d’énergie pourraient permettre créer entre 830 000 et 900 000 emplois ainsi que diviser par deux la facture énergétique des ménages d’ici 2050 grâce à la réduction de la consommation finale d’énergie, et donc une augmentation du revenu disponible.

En 2017, le service statistiques du ministère de la Transition écologique et solidaire dénombre 1.4 millions de personnes dans le secteur des transports, parmi lesquelles 475 000 (35,1%) dans le transport de voyageurs (ferroviaire, transports collectifs, cars, aérien, taxis etc.) et 370 000 dans le transports de marchandises (27.4%, dont 97% de transport routier). Un enjeu majeur est celui de la sortie du diesel. Si le Comité Stratégique de Filière estime que la chute du diesel pourrait impacter environ 10 000 emplois industriels, une stratégie de planification de transports écologiques et populaires permettrait d’en créer bien plus. Ainsi, en 2017, l’Observatoire Prospectif des métiers et des qualifications dans les Transports et
la Logistique estime qu’il faudrait former près de 10 500 personnes à la conduite de véhicules de transports en commun. L’étude de P. Quirion (2013) basée sur le scénario Négawatt 2011 projette la création de 248 000 emplois dans les transports en commun, fret ferroviaire & fluvial.

 

18.1- Comment faire émerger des réponses industrielles aux enjeux des EMNR dans les domaines maritimes et fluviaux, et favoriser leur déploiement auprès des opérateurs ?

Le Règlement (UE) 2016/16281 , dit règlement EMNR, entré en vigueur le 1er janvier 2017,
définit des limites d’émissions polluantes pour les moteurs d’engins mobiles non routiers (EMNR). Le transport fluvial et maritime est une alternative crédible et conséquente à l’usage de la route pour le transport de marchandises au même titre que le transport ferroviaire. A condition de développer des carburants moins émissifs. Une politique de recherche publique doit être mise en œuvre combinée à des normes contraignantes de mise aux normes des navires, face à la multiplication de véritables « poubelles flottantes ».

Les cargos qui acheminent 90% des marchandises de la planète génèrent une pollution digne des pires heures de l’ère industrielle. Un cargo produit autant de souffre qu’un million de voitures. Chaque année en Europe, les émissions du transport maritime causent près de 60 000 morts et coûtent 58 milliards d’euros aux services de santé. Les bateaux de croisière ne sont pas en reste. Pour exemple, le Harmony of the seas, le plus grand paquebot de croisière du monde, brûlerait quotidiennement quelque 250 000 litres du diesel le plus polluant du monde. La priorité est à l’arrêt de l’utilisation du fuel lourd non raffiné qui est extrêmement polluant (3500X plus de souffre que dans du diesel classique). De plus, ces navires brûlent aujourd’hui du carburant alors même qu’ils sont en stationnement, polluant alors l’air des riverains du port. Les systèmes d’alimentation électrique à quai permettraient d’éteindre leurs moteurs auxiliaires et ainsi d’utiliser le réseau électrique auquel le port est raccordé. Enfin, de nombreuses études suggèrent qu’une réduction de plus de 90% des émissions d’oxydes de soufre est également possible grâce à l’utilisation d’épurateurs.

Rappelons, une fois de plus, que l’urgence écologique implique plus globalement l’arrêt du grand déménagement du monde et donc une relocalisation des productions. Il n’y a que ce biais qui puisse réduire « à la source » et de manière conséquente, les émissions de GES des navires.

 

19.1- Quel diagnostic faites-vous de l’évolution de l’industrie aéronautique et spatial européenne, dans un contexte mondial fortement concurrentiel en mutation rapide ?

19.2- Quelles actions communautaires de soutien à l’industrie aéronautique et spatiale proposez-vous ?

20.2- Quelles initiatives (expérimentation, infrastructure, règlementation, soutien financier public) soutiendrez-vous pour favoriser le développement du véhicule autonome et connecté en Europe ? Comment éviter que ne se créent des fragmentations de marché avec le déploiement de technologies potentiellement incompatibles entre elles ?

A l’heure de l’urgence écologique, il nous semble que la priorité ne soit pas au développement
du véhicule autonome pour caprices de citoyens aisés, mais au déploiement d’une offre de transports écologiques et populaires. Rappelons que la mobilisation des gilets jaunes a montré une claire demande de justice fiscale. Les ménages aux faibles revenus possèdent généralement des voitures plus anciennes et plus consommatrices de carburant. Et le budget carburant pèse deux fois plus dans leur budget que celui des plus riches (quasi 8% pour le premier décile contre moins de 4% pour le dixième décile). Un Français sur quatre dépense plus de 150 €/mois pour aller travailler en voiture, et le transport représente 21 % des
dépenses des ménages ruraux. En parallèle, les alternatives se font rares, et souvent chères.

 

20.3- Faut-il réviser la Convention de Vienne, notamment sur le régime de responsabilité ? Quelle doit-être la place et le champ de l’autorité publique dans la régulation du véhicule autonome ?

Depuis la fin des années 2010, des véhicules autonomes circulent sur les routes étasuniennes. En Europe, plusieurs sociétés commerciales promeuvent leur développement. Or, ces véhicules posent une série de trois problèmes qui nous paraissent insurmontables et justifient de protéger la Convention de Vienne. D’abord, ils reposent sur des choix algorithmiques figés, qui hiérarchisent l’action à mener en cas de danger. Des voitures autonomes en phase de test ont ainsi pu, chez Uber, heurter une passante assimilée à un obstacle mineur. Ces véhicules fixent des populations qui seront sacrifiées sur certains arbitrages, choix moralement inacceptable. L’approfondissement de l’emprise des systèmes électroniques au détriment des systèmes mécaniques de décision est un second danger. Le crash des Boeings 737 MAX, suite à la panne du mode pilotage automatique, rappelle que l’automatisation devient rapidement incontrôlable. En plus des dangers pour les passagers, les conducteurs et les passants, l’automatisation des
véhicules menacerait les professionnels de la route et de la conduite. Des caisses de marchandises sont déjà transportées de façon intégralement automatisée sur les routes étasuniennes, reléguant progressivement les anciens salariés du transport aux tâches les plus ingrates de chargement et déchargement.

 

21.1- L’Union européenne doit-elle accompagner le développement du train autonome, et comment ?

22.1- Quelles sont vos convictions en matière d’organisation de la gouvernance des données, qui concerne tant leur production, leur propriété, leur protection, que la régulation de leur usage ? Faut-il ouvrir totalement ou assurer la préservation des prérogatives des opérateurs et collectivités qui financent et produisent les services de mobilité ?

23.1- Que pensez-vous du PCRI actuel, de ses objectifs, et de ses effets sur le dispositif de recherche français ?

23.2- Alors que l’Union n’investit que 2% de son PIB en R&D (là où les Etats-Unis investissent
2,8%), le PCRI peut-il constituer un instrument au service de la politique des transports ?

23.3- Quels autres dispositifs ou actions en matière de recherche pluridisciplinaire permettraient d’anticiper des évolutions futures ?

24.1- Le soutien de l’Union européenne au programme de recherche Shift2Rail doit-il être
renouvelé pour la période 2021–2027 ?

25.1- La nouvelle situation frontalière des ports français mérite-t-elle un soutien adapté particulier ?

26.1- Comment éviter que le Royaume-Uni ne devienne un hub international permettant l’accès
dérégulé au Ciel européen ?

26.2- Comment éviter la fragmentation du Ciel unique européen ?

L’UE prétend contribuer par son action à relever les grands défis des systèmes de transports : densité du trafic, concurrence, dépendance vis-à-vis du pétrole, émissions de gaz à effet de serre, etc. D’ici à 2050, l’UE doit notamment réduire les émissions du secteur des transports d’au moins 50 % par rapport aux niveaux de 1990, afin de limiter le réchauffement planétaire à 2°C. Dans le même temps, dans le champ du trafic aérien, l’initiative « Ciel unique européen » de l’UE vise à rendre « de plus en plus facile et bon marché de voyager en avion. »

Avant de s’intéresser aux conséquences du Brexit, questionnons nous sur les politiques européennes en matière de transports aériens et leurs impacts à l’échelle nationale. Quid de la
sécurité des transports alors que cette même stratégie vise à accroître le nombre de passagers par des prix toujours plus bas ? Quid des horaires et conditions de travail du personnel de vol et au sol alors que les grèves dans les compagnies low-cost se succèdent ? Quid des politiques environnementales et des objectifs de réduction des émissions de GES, en dichotomie totale avec la marchandisation croissante du secteur ?

Nous pensons que la priorité est à la maîtrise publique des infrastructures, notamment
aéroportuaires. Les aéroports sont un secteur stratégique pour l’État qui rapporte chaque année aux finances publiques plusieurs dizaines de millions d’euros de dividendes via l’APE. Les aéroports sont un outil majeur de souveraineté pour la nation. En revendant ses parts dans les aéroports français, l’État délègue la gestion des sites à des entreprises privées. Dernier exemple en date, la privatisation d’ADP est une aberration anti-écologique. L’aviation est un secteur qui n’est pas couvert par les Accords de Paris et le kérozène aérien n’est pas taxé. L’avion émet jusqu’à 40 fois plus de CO2 que le train par kilomètre parcouru et par personne transportée. Les émissions de GES liés au secteur de l’aviation civile pourraient passer de 2% des émissions mondiales aujourd’hui à 20% d’ici 2050. Comment les contrôler en privatisant les infrastructures et en libéralisant le secteur ?

 

27.1- Quelles actions l’Union européenne pourrait-elle mettre en place pour favoriser la continuité de la production industrielle européenne dans le secteur des transports ?

28.1- En conclusion, quels sont les grands principes qui fondent votre vision d’une politique
commune des transports ?

Face à l’urgence écologique, nous revendiquons le développement par la planification publique de transports écologiques et populaires c’est-à-dire accessibles tant en fréquence, qu’en dessertes et en coûts, et les moins polluants au kilomètre par personne transportée. Cela doit permettre au peuple d’avoir accès à ces réseaux qui eux-mêmes donnent l’accès à d’autres réseaux collectifs qui lui garantissent une vie digne. Il s’agit ainsi de planifier l’organisation des transports dans la perspective d’un nouvel aménagement qui ne mette pas les territoires et les citoyens en concurrence mais en relation. Ces transports écologiques et populaires doivent être mis au service d’une économie relocalisée conditionnée par ce que nous appelons la « règle verte » et respecte ceux qui sont aujourd’hui les travailleurs-esclaves de la route.